Benoît Cadorel, maître de conférences en géométrie, est le nouveau coordinateur de la commission parité depuis le 1er février 2022. Il succède à Irène Marcovici. Interview.
En tant que nouveau coordinateur de la commission parité, qu’est-ce qui a motivé votre engagement ?
Comme beaucoup de mathématicien·nes, j’ai été confronté au problème de la parité très tôt dans mes études : je me souviens notamment de ma promotion de L3 à l’ENS qui ne comprenait que trois filles pour une quarantaine d’étudiant·es au total. La situation ne s’est pas améliorée au fil des années, et j’ai bien dû prendre conscience de l’existence de « plafonds de verre » à plusieurs niveaux, particulièrement présents dans les disciplines mathématiques. Tout cela s’inscrit dans une forme de cercle vicieux, notamment relié au fait que les mathématiques ne sont malheureusement pas attirantes pour beaucoup de jeunes filles. Je trouve cette situation assez révoltante, et j’espère pouvoir contribuer modestement à l’amélioration des choses par ma participation aux activités de la commission parité de l’IECL.
Quels sont les enjeux de la parité dans un laboratoire de recherche ?
Il me semble que l’on peut distinguer deux types de questions. Il y a d’une part des enjeux internes au monde de l’enseignement et de la recherche : comme partout ailleurs, les membres d’un laboratoire peuvent être confronté·es à des situations problématiques en fonction de leur genre, mais aussi de leur statut, de leur origine sociale… Pour mentionner un élément issu de débats récents : la proportion de femmes accédant à une position de rang A est beaucoup plus faible que pour les hommes ; il s’agit là encore d’un plafond de verre qui n’est basé sur aucune réalité autre que sociétale, et contre lequel il me semble que nous avons le devoir d’agir.
Il y a ensuite des enjeux de nature plus globale : essayer de faire en sorte que les constructions sociales qui bloquent l’accès des femmes aux mathématiques ne se transmettent pas aux générations futures. Il s’agit là d’un problème sur lequel chacun·e d’entre nous a un rôle à jouer ; un point qui me semble important consiste par exemple à transmettre à la société des modèles de mathématiciennes dans lesquels les jeunes filles puissent se projeter.
Quand on parle de parité, à quoi pensez-vous ?
Il s’agit pour moi d’un enjeu par lequel tout le monde devrait se sentir concerné, et qui dépasse bien sûr le cas particulier des mathématiques : il me semble capital que chacun·e puisse prendre sa part dans l’élaboration du monde de demain, et pas seulement une moitié arbitraire de l’humanité. Aussi, vu l’importance que semblent prendre les mathématiques et leurs dérivés pour les décennies à venir (je pense notamment à l’intelligence artificielle, à la modélisation pour la recherche en épidémiologie, en climatologie etc.), je pense que les mathématicien·nes (et les scientifiques en général) ont un rôle crucial à jouer dans la construction d’un monde paritaire.
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